Manuel Cirauqui, Drac Ile-de-France, 2006

Dislocation et révélation. Chaque oeuvre de Sophie Dubosc paraît obéir méticuleusement à ces deux impératifs. Son travail s’infiltre parmi les objets du monde par le biais d’altérations précises d’un ordre qui, paradoxalement, ne devient lisible que lors de sa propre interruption. 

Chaque objet est un médiateur entre les personnes et évoque un faisceau de situations possibles, aussi bien qu’un faisceau de conflits. Si chaque objet représente sa propre idée, joue un rôle, alors toute représentation que l’on puisse en faire s’avère capricieuse, incomplète. Sophie Dubosc travaille au niveau de l’articulation, c’est-à-dire de la syntaxe des objets. Il suffit d’opérer un changement d’orientation au sein des choses pour que celles-ci débordent leur propre sens.

Chaque oeuvre est basée sur un ou deux actes essentiels : verser de l’encre sur un bureau (Décharge), couvrir un miroir (Couvrante). Plutôt que de parler à travers les choses, ce sont les choses qui parlent à travers une pratique artistique aussi violente que discrète. Cette pratique s’établit là où l’objet (l’ampoule, la bouche d’aération) est susceptible de devenir question.

Le langage plastique de Sophie Dubosc fait preuve d’une économie (étymologiquement) radicale : une action concrète sur un objet donné, dirigée vers le point le plus faible de celui-ci, vers sa racine contradictoire. Chercher le talon d’Achille de chaque chose pourrait être sa devise. Un art presque minimum, invisible, mais jamais muet.

Le « message » est un artifice. Dans l’oeuvre de Sophie Dubosc, la contradiction prend le raccourci du corps, elle évite le détour logique pour révéler sa condition tactile.